Banière alois
Accueil - Aloïs - Témoignages - Maltraitance - Liens - Plan du site

Médicalistes

Accueil>Témoignages>Rencontre-débat sur la maladie d'Alzheimer

Une rencontre-débat sur la maladie d'Alzheimer

Compte-rendu rédigé par Jo & Philippe
8 avril 2006
Pour compléter cette page
 

Organisée le vendredi 31 mars 2006 à l'initiative des associations de familles rurales, la rencontre-débat a eu lieu à Saint Benoît-du-Sault dans l’Indre et était animée par quatre intervenants du réseau Être-Indre. Un public très nombreux et varié assistait à la rencontre : médecins, personnels soignants, beaucoup d'auxiliaires de vie, proches de malades ou encore des personnes qui se posent des questions à propos de la maladie.

La séance s’est déroulée en deux parties : la projection d’un film de 25 minutes, Alzheimer mon amour tourné en 1998 et des questions-réponses.

fleche retour en haut Le film

Le film Alzheimer mon amour présente des moments de vie au quotidien de deux couples issus de milieux plutôt aisés : des personnes cultivées. Le choix de ces deux couples est volontaire, il faut bien comprendre que, même si l'on doit se garder de généralisations excessives, souvent, dans les milieux modestes, les difficultés rencontrées sont encore plus grandes.

Dans le 1er cas, c'est la femme qui est atteinte. Elle a entre 65 et 70 ans, est toujours fort jolie, vit à son domicile, auprès de son mari qui veille sur elle; ils sont aidés par une auxiliaire de vie. Leurs enfants et petits-enfants viennent les voir - leurs amis aussi = ce qui est un soutien moral considérable. Elle est totalement dépendante pour tous les actes de la vie quotidienne et soliloque souvent, à voix assez basse.

Comme ce couple dispose d'un grand jardin, il est facile de promener A-M; son mari l'emmène aussi marcher à la campagne. Il la tient par la main. Quelles que soient les difficultés rencontrées, le mari témoigne : il aime sa femme et tient, grâce au souvenir des jours heureux; il n'envisage pas de continuer à vivre si sa compagne décède.

Dans le 2ème cas, c'est l'homme qui est atteint depuis 1995 (il a environ 75 ans). Sa femme témoigne : ils ont d'abord continué tous deux à vivre chez eux (un pavillon entouré d'un jardin) mais Mme X. a dû se résoudre à faire entrer son mari, devenu très violent (en paroles et en gestes) dans un service spécialisé du C.H.U de Nantes, où il paraît plus calme et où il a pris ses repères. Le personnel est très attentif et chaleureux, dit Mme X. Elle va voir son mari tous les jours, pas très longtemps car il oublie vite sa présence. Mais elle note parfois des moments de lucidité.

Dans ce 2ème témoignage, Mme X. qui a tenu un journal de l'évolution de l'Alzheimer chez son mari, fait mention d'une scène particulièrement éprouvante pour le malade comme pour elle : M. X qui se voit en pied dans une glace du couloir dit à sa femme : « Va voir qui c'est, ce type, dans le couloir. Qu'est-ce qu'il veut ? » Il soliloque à haute voix, sans arrêt, répétant les mêmes choses, envoie les objets promener.

Dans les deux cas il y souffrance, mais l'amour conjugal durable est évoqué comme une aide puissante. AMOUR est le mot-clé.

Un long moment de silence s'est écoulé, après la projection. Le film Se souvenir des belles choses, une fiction très intéressante et émouvante de Zabou Breitmann a été évoqué aussi par les intervenants du réseau Être-Indre car il met en scène une toute jeune femme atteinte de la maladie d'Alzheimer, laquelle progresse d'autant plus vite chez elle qu'elle est jeune.

fleche retour en haut Sur la maladie d'Alzheimer et les tensions créées

fleche retour en hautQuestion :  la maladie d'Alzheimer entraîne-t-elle forcément des troubles de la mémoire ?

Réponse : Elle les entraîne systématiquement. Ce sont des troubles très particuliers. Rien à voir, par exemple avec : « Où ai-je garé ma voiture ? Sur le parking d'une grande surface », « Qu'est-ce que j'ai fait de mes clés ? etc. » - «  Ah ! Ce nom ! Je l'ai sur le bout de la langue. »

La personne perd le sens de l'orientation dans l'espace, dans le temps, présente des troubles du jugement, du langage. Les objets de la vie quotidienne ne sont plus identifiés, au stade avancé de la maladie.

Les malades désapprennent. La maladie d'Alzheimer est irréversible.

fleche retour en hautDans le public, un homme témoigne de sa vie avec  sa femme malade qu'il aime tendrement, dit sa crainte de mal faire, avant de recevoir de l'aide, ainsi que la fatigue pour le conjoint engendrée par l'évolution de l'Alzheimer. Il précise cependant que sa femme ne dort pas mal la nuit.

Réponse - Un tel sommeil est rare chez les malades Alzheimer, dont l'horaire de veille et de sommeil est le plus souvent inversé, irrégulier. Beaucoup de conjoints bien portants perdent peu à peu le sommeil, obligés qu'ils sont de veiller sur leur malade, la nuit. Christine cite le cas d'accompagnants (conjoints ou autres membres de la famille) ne dormant que trois heures par nuit depuis 10 ans ...)

Dans l'Indre, pour soulager un peu les aidants, des projets d'accueil de jour (dont un à Argenton-sur-Creuse) sont à l'étude pour permettre aux aidants de se reposer; on travaille également à mettre au point des « séjours temporaires de répit ».

Le monsieur qui témoignait reprend la parole, pour remercier les habitants de St Benoît-du-Sault qui, connaissant la maladie de sa femme, font preuve de solidarité envers le couple. A l'amour, mot-clé, on peut en ajouter un autre = l'entraide, certains prenant de plus en plus conscience que la maladie d'Alzheimer, cela n'arrive pas qu'aux autres ...

fleche retour en hautUne autre personne témoigne, dans le public : une femme dont le père (très aimé) est malade. Elle explique bien comment elle a refusé de croire son père atteint de l'Alzheimer, combien celui-ci était malheureux de se sentir diminué; il « trichait » pour masquer ses problèmes de mémoire. Un moment donné, tous deux se sont retrouvés face à un mur, par incompréhension mutuelle. La fille a même « ressenti de la haine » envers son père, jusqu'au moment où elle a enfin compris l'évolution de la maladie et où elle a reçu de l'aide.

Son père se trouve à présent en maison de retraite : il y a ses repères. La famille a cru lui faire plaisir en organisant une réunion à son ancien domicile. En fait, au bout d'une heure, il était complètement troublé ne sachant plus s'orienter dans sa propre maison.

Réponse -  Après ce 2ème témoignage très émouvant, la psychologue, Valérie, nous explique que personne (conjoint ou enfant) ne reconnaît la maladie d'Alzheimer, dans un premier temps, tellement on veut que la personne touchée aille bien. Ce qu'on « hait » ce n'est pas la personne mais sa maladie. Notre premier réflexe « air bag « , c'est de la refuser : « Non ! Ce n'est pas possible  ! » Les malades, eux, ont parfaitement conscience de ce qui se passe. Chacun (le malade comme son parent) cherche à protéger l'autre. D'où, l'impasse, « le mur » dont parlait la personne à propos de sa relation avec son père, au début de la maladie.

fleche retour en haut Question : la maladie d'Alzheimer est-elle héréditaire ?

Réponse - Une conférence a eu lieu en 2005 au Centre hospitalier de Bourges avec pour intervenant un spécialiste de la M.A. de la Salpêtrière à Paris. Il revenait d'un congrès mondial, à Washington. Il ressort, dans l'état actuel des connaissances au sujet de la maladie d'Alzheimer.

      1°) Qu'on ne peut pas assurer qu'elle soit transmise génétiquement.

      2°) Que dans 0,3% des cas, on trouve plusieurs personnes malades, dans plusieurs générations d'une même famille.

Il existe chez certains une telle peur de développer à leur tour une maladie d'Alzheimer, leur père ou leur mère ayant été frappé, qu'ils sombrent peu à peu dans un état dépressif. Ils risquent, effectivement d'être malades par « imprégnation ». Ils se conditionnent = «  c'est fatal ! Il (elle) l'a; je l'aurai. »

fleche retour en haut Question : pourquoi tant de violence, verbale ou physique, chez ces malades ?

Réponse -  Tout est multiplié par dix chez les personnes atteintes : aussi bien les colères que les élans d'amour. Elles gardent jusqu'au bout des élans de lucidité mais elles n'ont plus ce vernis social policé qui facilite les échanges. Elles ont leur propre logique, qui n'est pas la nôtre. L'avancée dans le toujours plus dur se fait différemment selon les malades : certains l'admettent plus sereinement que d'autres; pour ceux-ci, ce qu'ils ne peuvent plus faire les rend très agressifs. Mais parler de « méchanceté » à leur endroit n'a pas de sens.

fleche retour en haut Question : que faire quand les malades mangent avec les doigts ?

Réponse - Comment mangeait l'homme préhistorique ? Avec les doigts. Dans la maladie d'Alzheimer, ce sont les zones les plus récentes du cerveau, dans l'évolution de celui-ci, qui sont touchées. Les comportements venus du fond des temps restent. Si l'on s'entête à vouloir faire manger le malade à la fourchette ou à la cuillère, il va s'opposer et même, ne plus vouloir s'alimenter.

fleche retour en hautQuestion : des personnes jeunes peuvent-elles être atteintes ?

Réponse - Oui. Ces cas sont rares, à 30 ans mais il y en a. Il faut savoir qu'alors (comme pour certains cancers) plus la maladie débute tôt, plus elle évolue vite. L'espérance de vie est courte chez ces malades.

fleche retour en haut Question : a) Est-ce que, comme dans la dépression, un évènement grave peut ouvrir la porte à la maladie d'Alzheimer  ?

                   b)  Frappe-t-elle davantage les femmes que les hommes ?

Réponse -  a) Oui, dans 9 cas sur 10, la famille du malade est capable d'identifier un évènement important ayant marqué l'apparition  de la maladie (accident de voiture, deuil, par exemple)

                  b) Jusqu'à présent, la maladie touchait davantage les femmes, d'une part parce qu'elles sont plus nombreuses et vivent plus longtemps que les hommes. D'autre part, parce que dans les générations précédentes, les femmes faisaient moins d'études qu'eux.

La tendance pourrait s'inverser à l'avenir, les filles faisant de plus en plus d'études et se montrant souvent plus travailleuses et brillantes que les garçons.

fleche retour en haut Question : une dépression grave peut-elle évoluer en maladie d'Alzheimer ?

Réponse -  Oui. Mal diagnostiquée, mal soignée, elle le peut. D'autant plus que beaucoup de malades refusent catégoriquement d'aller passer des tests. Il y a, chez certains, un tel refus de la vieillesse et de la mort qu'ils préfèrent se réfugier dans la démence plutôt que d'affronter la réalité de la mort. (Les intervenants citent ensuite les travaux du Docteur Jean Maisondieu.)

fleche retour en haut Question : pouvez-vous nous donner des chiffres, des statistiques ?

Réponse - En janvier 2005, on comptait 830 000 malades avérés en France (diagnostiqués Alzheimer). Chaque année, on compte au moins 220 000 nouveaux cas parce que la population vieillit.

fleche retour en haut Question : et dans l'Indre ? Y a-t-il une moyenne d'âge établie ?

Réponse - En 2004, on comptait 2 600 cas de maladie d'Alzheimer et de démence diagnostiqués. (pour une population de plus de 23 0000 habitants). Il y a 800 personnes atteintes d'Alzheimer aidées dans le département de l'Indre.

La réalité approche plutôt les 3 500 cas. Beaucoup de malades, insistons là-dessus, refusant de passer les tests.

La moyenne d'âge n'est pas établie pour le moment.

Le médecin intervenant insiste sur la difficulté du diagnostic. On procède par élimination = tumeur au cerveau ? Autre formes de démence ? Dépression sévère ? Alzheimer quand les autres hypothèses sont éliminées et que les tests sont probants.

Il faut tout de même savoir qu'on se hâte parfois à tort dans les familles d'étiqueter Alzheimer des patients qui ne relèvent pas de cette maladie.

fleche retour en hautCe qui s'adressait surtout aux personnels soignants et aux auxiliaires de vie

1) D'abord, un rappel : la personne atteinte de la maladie d'Alzheimer est un adulte qui a désappris; ce n'est en aucun cas quelqu'un qui « retombe en enfance ». Donc il faut se garder de l'infantiliser. Par exemple on ne parlera pas de « couche » (c'est pour les bébés) mais de « protection ».

Les malades ne sont pas « le papy », « la mamie » mais Monsieur Untel, Mme Unetelle. Leur parler à la 3ème personne = « Il va se lever, elle va manger gentiment ... » ou bien « on va se coucher... » « on va prendre la douche » sont des formulations à éviter. La dignité des malades est à respecter !

2) L'équipe d'intervenants, en réponse aux remarques des personnels soignants et des auxiliaires de vie, en particulier constate que la formation donnée consacre très peu de temps à la spécificité de la maladie d'Alzheimer. Et travaille, de son côté, pour obtenir un changement à cette situation.

Dans une conclusion à cette rencontre débat, les intervenants disent que ce qui améliorerait les choses, ce serait les échanges de personnels, d'un centre hospitalier à l'autre, d'une maison de retraite à l'autre etc. pour aller voir ce qui a avancer, dans certaines équipes et échanger des observations, des savoir-faire. Là aussi, l'entraide.

Jo et Philippe ont assisté à cette soirée débat car ils sont directement concernés avec une maman diagnostiquée en fin d'année 2005.

fleche retour en haut

bannière les marguerites

 

Accueil - Aloïs - Témoignages - Maltraitance - Liens - Plan du site

© Aloïs et les auteurs des textes et illustrations - Contact